Traduction d'un extrait du programme : Pendant la nuit, nous avons rejoint la baie de Disco à nouveau. Dans la matinée, nous naviguons à travers le détroit de Vaigat avec, sur tribord, l'île de Disco et sur bâbord la péninsule de Nussuaq. Ici se trouve le champ carbonifère groenlandais qui a été exploité sur l'île de Disco depuis environ 1920. Dans les années 70, les mines et ainsi que les villages miniers ont été fermés en raison des coûts élevés d'exploitation et du manque de rentabilité. Il ya quelques années, tous les bâtiments le long du littoral ont été emportés par une énorme vague, consécutive à l'effondrement d'une montagne de l'autre côté du fjord. Dans l'après-midi, nous atteindrons Eqip Sermia. Ce glacier se déplace d'environ 2-3 mètres par jour et il y a de bonnes chances d'assister à un vêlage. Le front glaciaire est large d'environ 4,3 km. Eqip Sermia a été utilisé par de nombreuses expéditions comme point de départ. L'un des plus célèbres scientifiques est le glaciologue français Paul Emile Victor. Ce soir, le dîner sera un BBQ à terre en face du glacier. Cette zone est la nature à son meilleur - il n'y a pas de toilettes ou d'autres services à terre, mais peut-être beaucoup de moustiques ! .
Le Tsunami : un grand glissement de terrain survenu le 21 novembre 2000 à Paatuut, en face, sur l'autre rive du détroit Vaigat. 90 millions de m3 (260 millions de tonnes) de matières principalement basaltiques ont glissé très rapidement (vitesse moyenne 140 km/h) depuis 1000 à 1400 m d'altitude. Environ 30 millions de m3 (87 millions de tonnes) sont arrivés jusqu'à la mer, créant un tsunami d'une hauteur de 50 m à proximité de l'éboulement et de 28 m à Qullissat, une ville minière abandonnée en face de Paatuut, après avoir parcouru les 20 km de large du détroit Vaigat. L'événement sismique a été enregistré, ce qui permet d'estimer la durée du glissement à environ 80 secondes. Des modèles du terrain basés sur des photographies stéréographiques avant et après le glissement ont permis de déterminer la quantité de matériaux effondré, et le nouveau mode de dépôt. Des calculs simples du temps de déplacement du tsunami sont en bonne correspondance avec les rapports de la population du village le plus proche, Saqqaq, à 40 km de Paatuut, où bien que réfractée, l'énergie du tsunami a détruit un certain nombre de bateaux. Les glissements de terrain ne sont pas rares dans la région en raison de la géologie à forte densité de roches basaltiques recouvrant les roches sédimentaires mal consolidées, mais l'importance du glissement de Paatuut est inhabituelle. Sur la base des observations, il y a probablement au moins 500 ans qu'un tel événement conjugué à un tsunami de cette importance n'était pas survenu. Le déclenchement du glissement de Paatuut semble avoir été causé par les conditions climatiques dans les jours précédant le glissement où le regel d'eau de fonte dans des fissures préexistantes pourrait avoir causé la destruction de la montagne.
20 août, 7 h 30 avant d'aller déjeuner. Le grand
beau temps est revenu aujourd'hui. Nous sommes à quelques
centaines de mètres en face de Qudligsat, une ancienne
bourgade minière. La mine de charbon a
été exploitée depuis les
années 20 jusque dans les années 70. Qudligsat
est située sur la rive ouest (île de Disko) du
Vaigat-sound alors que la péninsule Nussuaq en constitue la
rive est.
Qudligsat est une ville "fantôme" et semble avoir été abandonnée du jour au lendemain. Pourtant bien que défraîchies, les couleurs des maisons se reflètent encore magnifiquement dans les eaux calmes ce matin. Cependant, il ne reste plus que les fondations des maisons les plus proches du rivage.
Je vais prendre mon petit déjeuner pour débarquer
peu avant 9 h sur la grève... Bien sûr je commence
par ramasser un peu de sable. Sur la grève large d'une
dizaine de mètres environ : une brouette, un baril
rouillés. Je m'éloigne un peu de la
grève alors qu'il ne reste plus que les fondations de
beaucoup de maisons... Sans doute que tout le reste a
été emporté par le tsunami. Pour l'une d'entre elles, c'est comme si on avait
replié les murs du rez-de-chaussée sur
eux-mêmes en laissant pratiquement intact l'étage
sous le toit qui gît de guingois sur les fondations et
l'empilement des murs du rez-de-chaussée. D'habitude,
j'évite autant que possible de photographier les poteaux
électriques ou lampadaires mais ici je les laisse
volontairement avec leur fils coupés dans le cadre de mes
photos. Apparemment, le tsunami n'est pas la cause de la destruction de
toutes les maisons "manquantes" car pour certaines, leur emplacement
est situé bien trop haut sur le coteau. Sans doute celles-ci
ont été démontées pour
être reconstruites ailleurs. A propos de maison, on observe
facilement une "hiérarchie" : les maisons des ouvriers et
à l'écart vers le sud au-delà du
cimetière, les maisons plus vastes des dirigeants avec
semble-t-il entre les 2 quartiers des maisons intermédiaires
pour les cadres et contremaîtres. Près de
certaines d'entre elles, du linge sèche toujours sur les
fils et beaucoup d'entre elles disposent d'un enclos
grillagé destiné sans doute aux chiens. A mi
hauteur, un bâtiment avec un enclos grillagé plus
vaste : sans doute l'école et sa cour de
récréation. A proximité, un tracteur
complètement rouillé... sans moteur. Plus haut
encore, sans doute une entrée (ou l'entrée ?) de
la mine sur un chevalement de bois. Elle me semble toute petite par
rapport au nombre d'ouvriers qu’il a dû y avoir
compte tenu du nombre de maisons ; elle me fait penser à un
décor de western…
Le panorama vu d’ici sur le détroit et la péninsule de Nussuaq est magnifique avec la très légère brume qui stagne par endroits au-dessus de la mer. Rentré chez moi, je me rends compte que j'ai déjà photographié une aiguille assez caractéristique de l'autre côté du détroit : c'était vers 22 h le 11 août dernier alors que nous naviguions de Qeqertarsuaq à Ummannaq. Plus attiré par la rive est éclairée du soleil du soir, je n'avais pas remarqué l'ancienne mine sur la rive à l'ombre.
Je redescends et me dirige maintenant vers le "quartier des patrons" et le cimetière en franchissant le petit torrent sur une poutre remplaçant la moitié du pont effondré. Près d'une maison, un petit camion à la cabine jaune semble presque en état de fonctionner. Comme les maisons, il semble ne pas avoir trop souffert de 30 années d'abandon. Accompagné toujours de Jean-Louis et Bernard, je remonte la pente vers le cimetière juste au-dessus du camion jaune. La plupart des tombes semblent entretenues de temps en temps ; au centre du cimetière, de petites tombes d'enfants de 4 et 1 ans décédés dans les années 20 voisinent la tombe d'une femme d'une trentaine d'années, du même nom, sans doute leur mère enterrée en 1930.
Vers 11 h nous rejoignons le Fram qui lève l'ancre
à midi pour Eqip Sermia après une navigation dans
la baie de Disko. Ça y est, à 15 h nous doublons
la pointe sud-est de l'île de Disko. On ne voit pratiquement
plus de calotte glaciaire sur le Groenland. Sans les icebergs, on
pourrait presque se croire près de la côte
norvégienne. Certains icebergs sont vraiment
énormes et font penser à des îles
enneigées. Ils commencent par dériver
vers le nord avant de rejoindre le courant du Labrador qui va les
ramener vers le Sud et notamment Terre-Neuve. Là-bas entre 2
icebergs j'aperçois un navire rouge montant vers
le nord : c'est le MV Explorer qui coulera quelques mois plus tard, en
novembre 2007, au large des Shetland du Sud après avoir
heurté un growler [?].
Vers 16 h 30, le Fram s'engage dans le fjord pour rejoindre le front du
glacier Eqip Sermia. Une heure plus tard, nous apercevons celui-ci
alors que le Fram se dirige vers une petite anse située
juste en face... mais à 5 km environ. Tout près d'ici se trouve l'ancien camp de base
occupé par quelques expéditions
dirigées par Paul Émile Victor. Le front du
glacier est large de 4,3 km environ et il avance assez rapidement : 2
à 3 m par jour.
Après que le staff et le personnel du restaurant aient
installé les tables, les caisses de victuailles etc. pour le
pique-nique, nous débarquons vers 19 h alors que le soleil
descend vers l'horizon et colore d'une magnifique manière le
glacier, la lande sur les montagnes environnantes. Il y a
déjà une longue queue devant les
étals... je m’en vais d'abord photographier le
glacier et essayer de faire un panoramique de la rive
opposée du fjord avec ses 2 fronts glaciaires. Si marcher
sur les rochers est facile, je ne m'aventure
qu'épisodiquement dans les zones couvertes de lande
épaisse où l'on ne sait pas trop où
l'on pose le pied : est-ce dur ? est-ce mou ? vais-je me tordre la
cheville entre 2 cailloux cachés ? Il y a aussi quelques
moustiques et moucherons mais bon pas trop méchants et c'est
l'occasion de tester la moustiquaire de tête
prêtée par Christiane restée
à bord du Fram. Je reste un peu en face du front glaciaire
attendant une chute de séracs... en vain et de toute
façon, nous sommes très très loin. Je
passe rapidement aux buffets installés en haut de la
grève avant de repartir assez vite faire des photos.
Finalement, je regagne le Fram à 21 h alors que la
lumière devient vraiment magnifique ce soir avec notamment
l'ombre du Fram se profilant sur la lande couleur d'automne, rouille...
C'est très très beau.